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Antoine de Chambost • Écologie, Numérique et Coopération

28 novembre 2018

Quel est ton parcours ?

J’ai grandi dans une cité Castor à Suresnes, le domaine des Hocquettes. J'y suis resté jusqu'à mes 23 ans, âge auquel j'ai passé le périphérique pour m'installer à Paris et profiter de la capitale.

 

Les cités Castor ont été fondées lors d'un mouvement d’auto-construction coopérative d’après-guerre. C'est l’ancêtre de l’habitat participatif. C'est dans ce mouvement qu'a été mise en pratique la notion "d'apport travail" pour permettre à des personnes sans apport financier d'accéder à la propriété.

 

Le lieu est aussi auto-géré par les habitants depuis plusieurs dizaines d'années. Il propose de nombreux espaces communs : bibliothèque, atelier de fabrication, jardins partagés, terrain multi-sports, salle des loisirs, salle des jeunes, appartements pour les invités...

"Ayant développé très tôt l'esprit de coopération, je me sens à la maison dans des structures coopératives telles que CASACO (SCIC) ou Coopaname (SCOP) !"

Côté études, j’avais deux sujets d’intérêt : l’informatique et la science, la chimie en particulier. J'ai finalement choisi des études d'ingénieur chimiste. En 2000, après mon diplôme obtenu avec une dernière année en apprentissage chez 3M, j'ai bifurqué vers l'informatique. J’ai eu alors l’opportunité de travailler au sein de grandes sociétés de service en informatique.

Après une année sabbatique à Montréal, comme j'aimais la photo, j'ai rejoint un éditeur de logiciels de photothèques puis médiathèques en ligne (SaaS) pour les entreprises du CAC40 en tant que chef puis directeur de projets.

Ayant la fibre écologique, je m’interrogeais de plus en plus sur ce que je voulais vraiment faire de mes heures de travail et dans quel cadre.

Ma question est simple : comment exercer une activité professionnelle rentable tout en ayant un impact environnemental fort ?

En 2015, après la naissance de mon 4e enfant, je deviens alors consultant en gestion des contenus multimédias numériques (ou DAM, Digital Asset Management) à la Coopérative d’Activités et d’Emploi (CAE) Coopaname, en tant qu’entrepreneur-salarié puis associé. Coopaname est une société (SCOP) de portage salarial avec une gouvernance partagée et une école coopérative opérée et financée par les coopérateurs.

L'histoire de Ma petite couche

Je rencontre Philippe Gaillard dans un espace de coworking. Il est dirigeant d'un site d'e-commerce distribuant des pièces auto en ligne. Lors de cafés, on discute enfants, on en a un du même âge et on en arrive au problème des couches ! Lui et moi avons essayé les couches lavables et nous avons abandonné avec regrets...

Après quelques recherches sur les solutions de couches textiles, nous constatons qu'aucun service location/lavage n'a percé en France alors qu'ils fonctionnent très bien hors de nos frontières. Le projet Poponet démarre en novembre 2015 et en avril 2017, Philippe deviendra mon associé pour créer la société Ma petite couche.

Ma petite couche va développer le concept de couches lavables en tant que service.

Nous avons pris contact avec l'association Zero Waste France dont nous avons reçu le soutien immédiat. Grâce à elle et ses mises en relation, nous entrons dans le monde merveilleux des acteurs français de la couche textile. En janvier 2017, nous sommes sélectionnés par un incubateur : Antropia, spécialisé dans l'entrepreneuriat social et solidaire. Hébergé par l’école de commerce ESSEC, cet incubateur nous offre pendant 6 mois un accompagnement de haut niveau pour développer notre projet !

A partir de mars 2017, Philippe et moi nous consacrons à Ma petite couche, avec une complémentarité de nos compétences : Philippe sur la gestion et l'opérationnel, Antoine sur l’écosystème.

"En avril 2017, Ma petite couche, le service de location et lavage de couches textiles pour les bébés, est créée. C’est une entreprise de l’Économie Sociale et Solidaire (ESS)"

Nous obtenons également l’agrément ESUS : limitation des écarts de salaires, répartition des bénéfices encadrée, gouvernance démocratique avec les parties prenantes, mission sociale et environnementale... réinvestissement dans la structure.

Côté financement, outre nos apports personnels, c'est Hauts-de Seine Initiative (HDSI) qui accorde à Ma petite couche des prêts d'honneur, en parallèle de prêts de la BNP Paribas puis de La Nef.

Un pilote du service de location/lavage est alors lancé à Issy d’avril à août 2017, avec 5 familles pionnières. Cela nous a permis d’affiner notre modèle pendant quelques mois. En septembre 2017, nous lançons commercialement le service de location/lavage et très rapidement celui de location "simple" (sans le lavage). Petit à petit, Ma petite couche étend son service aux Hauts-de Seine et dans le 15ème à Paris en location/lavage et dans toute la France en location "simple".

"La mission de Ma petite couche est de populariser la couche lavable en France en la rendant simple et financièrement accessible à tous. "

Pour y parvenir, Ma petite couche propose la couche lavable en tant que service sous 2 offres :

  • une offre location et lavage, disponible en régions parisienne pour le moment ;
  • une offre location "simple", déjà disponible dans toute la France.

Concrètement ce sont des offres sans engagement avec un abonnement minimum de seulement 2 semaines. Car un des freins est l’investissement important, 300 à 400€ quand on veut acheter ces couches. Il s’agit donc de permettre l’expérimentation du service pour enclencher la démarche. C’est aussi facile, pratique et pas plus cher que des Pampers ! On peut s’inscrire en quelques minutes, et on reçoit pour 400 Euros de couches, sans caution !

Les bénéfices principaux de Ma petite couche sont :

- la réduction des déchets :en réduisant de 95% par rapport aux couches jetables à usage unique qui finissent dans la poubelle grise :

- la protection des bébés : depuis plusieurs années, de nombreuses marques de couches jetables ont été analysées, notamment par 60 millions de consommateurs, et reconnues nocive par la présence de perturbateurs endocriniens, des résidus de pesticides notamment du glyphosate et de différents produits chimiques de synthèse.

Ma petite couche est une actrice de l’économie circulaire, et plus précisément de l’économie de la fonctionnalité. Les clients payent une performance d'usage, un service de change 0 toxique 0 déchet pour leurs bébés. Ils n'achètent plus un produit, une couche textile lavable, mais s'abonne à un service. pour le service de blanchisserie, Ma petite couche s'appuie sur des ESAT (Etablissement et service d’aide par le travail). Les couches sont livrées à domicile en vélo.

Nous avons été agréablement surpris de la vitesse à laquelle le service a été adopté.

Nous avons même un peu été dépassés par la demande, notamment après notre passage dans l'émission de France 5 la Maison des Maternelles !

Quel est ton projet actuel ?

A titre personnel, j’habite depuis peu à Compiègne, dans l’Oise, à une heure de Paris.

Ce déménagement me permet de vivre sereinement l'agrandissement de ma famille avec la naissance de mon 5e enfant en août dernier.

Je suis également membre des collectifs d’indépendants du numérique Happy Dev et Numéricoop. Fondé en 2015, Happy Dev est un réseau de freelances qui se pose comme une nouvelle forme d’entreprise. Basé sur l’intelligence collective, il propose une alternative agile aux multinationales. Numéricoop est une marque issue du collectif des métiers du numérique de la CAE Coopaname. Ces deux collectifs apportent une nouvelle façon d'envisager le travail dans le numérique, hors du salariat.

L'objectif de Ma petite couche est de poursuivre le développement et le déploiement de son activité. Pour l'offre location/lavage, li s'agit de déployer sur d’autres arrondissements de Paris et dans les grandes métropoles régionales. Dans ce cadre, j’envisage également de constituer une SCIC pour essaimer Ma petite couche en Picardie.

Un autre axe de développement est de proposer une offre auprès des crèches (parentales, privées, d’entreprises...) et des maternités. Pour l’instant, nous travaillons essentiellement auprès des particuliers. Nous souhaitons aussi accompagner dans la parentalité les employé.e.s des entreprises, notamment via la mise à disposition de notre service dans les conciergeries d’entreprises.

Comme nous participons à la réduction des quantité d'ordures ménagères à collecter et à traiter, nous aimerions recevoir le soutien des communautés de communes ou d'agglomération en charge de la gestion des déchets. Nous sommes un acteur du Grand Paris Circulaire, via la réduction des déchets !

Par ailleurs, de plus en plus de porteurs ou porteuses de projet nous contactent pour développer ce service en régions. Nous sommes actuellement dans une logique d’essaimage. Nous cherchons à développer des affiliés plus que des franchisés. Notre service crée beaucoup d'emplois locaux : blanchisserie, pliage des couches, livraisons à vélo.... Nous sommes donc attentifs aux partenariats que nous engageons.

A plus long terme, un autre axe de recherche et développement et de débouchés serait de valoriser les urines et les selles des bébés, sous forme énergétique avec la méthanisation ou sous forme d'engrais naturels avec le compostage.

Depuis septembre 2018, nous avons rejoint le programme d’accompagnement "Start Up" de l'incubateur Antropia ESSEC. Cette fois-ci, il s'agit d'une période de 12 mois avec un accompagnateur stratégique et des étudiants mis à disposition de Ma petite couche pour accélérer le développement et préparer une levée de fonds permettant à Ma petite couche de changer d'échelle.

Mon projet est de consolider l'écosystème autour de Ma petite couche : développer des partenariats, animer la communauté, m'impliquer dans les associations Zero Waste France et le Mouves (Mouvement des entrepreneurs sociaux), obtenir des subventions régionales et européennes, discuter avec des fonds d'investissements, trouver des partenaires industriels...

Pourquoi le coworking ?

En 2015, en devenant entrepreneur et associé de Coopaname, je découvre également les espaces de coworking. Je retrouve un mode de fonctionnement familier et je rencontre de nombreuses personnes inspirantes, à Paris, à Issy et bien sûr... à Malakoff !

Je deviens "digital nomad" sans le savoir. Au début, je me sens plutôt sans bureau fixe que nouvel aventurier du futur de travail.

Pourquoi Casaco ?

En 2015, au moment où j’ai commencé à travailler sur mon projet, je recherchais des lieux de travail où pouvoir échanger, avec des valeurs proches et une certaine émulation.

"Le fait que Casaco soit une coopérative m’a plu pour toutes les raisons citées en préambule. "

J'ai essayé plusieurs tiers lieux. Malakoff, était assez proche de chez moi et je pouvais venir à vélo. Je venais de rencontrer mon associé et nous alternions entre deux espaces de coworking en fonction de notre agenda.

Habitant maintenant à Compiègne, j'essaie de venir une fois par mois lors de la journée des membres de CASACO. Pour le quotidien, j'ai trouvé un nouveau tiers-lieu : La Plage Coworking à Compiègne, un espace de travail la journée et le lieu de vie du sympathique gérant Olivier le soir et le week-end.
Encore une nouvelle expérience... ;-)

Article écrit par Sybille, coach et formatrice, membre de la Tribu et co-gérante de la coopérative